épisode

#45

Le juge raccroche

Après le sabotage de trois lignes TGV le 8 novembre 2008, Julien Coupat et huit de ses amis, sont mis en examen pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. Le juge Thierry Fragnoli et la SDAT ont commencé, un peu tard, à s'occuper de trouver des preuves de ces sabotages. Ils ont échafaudé des hypothèses. Le premier a jeté l'éponge, en mars 2012.

La lettre est adressée par le juge d’instruction Thierry Fragnoli au procureur de la République à Paris, le 27 mars 2012:

« A la suite de la parution depuis trois ans de nombreux articles de presse, dont certains mettent en cause mon impartialité, dans l’instruction du dossier 17/08 (AMT et dégradations SNCF), j’ai l’honneur de vous informer que je n’estime plus disposer de la sérénité nécessaire afin de poursuivre cette information judiciaire dans des conditions permettant une bonne administration de la justice, et vous prie de bien vouloir apprécier l’opportunité de faire application des dispositions de l’article 84 du code de procédure pénale. »

Le magistrat jette l’éponge, après avoir incarné pendant trois ans et demi le dossier – même si deux autres juges étaient cosaisis.

« Combat personnel contre M. Coupat et les avocats de ce dernier »

Le point de départ est cet article du Canard enchaîné, le 13 mars 2012 :

Soyons honnête : l’opération laisse un certain malaise à l’auteur de ces lignes – qui n’était pas récipiendaire de l’e-mail du magistrat. Le Canard n’est-il pas allé trop loin, révélant, sinon l’une de ces sources, du moins celles de confrères ?

Quoiqu’il en soit, la machine anti-Fragnoli est relancée. Le 16 mars, les avocats de la défense – avec en tête Jérémie Assous – déposent une « requête aux fins de récusation », qui se fonde également sur le chapitre consacré au juge dans le livre Tarnac, Magasin général, du journaliste David Dufresne, sorti en février 2012. Dans l’ouvrage, l’auteur se garde bien de retranscrire des conversations dans lesquelles le juge romprait le secret professionnel, mais il décrit une attitude qui montre, selon la requête, que Thierry Fragnoli mène un « combat personnel contre M. Coupat et les avocats de ce dernier »*.

Un combat qu’il décide finalement d’abandonner**. En janvier 2013, son Nemesis, Jérémie Assous, quitte également le navire, après avoir pris ombrage des initiatives de ses clients. Et aussi, au fond, parce qu’il commençait à tourner dans le vide, sans juge à vilipender. L’affaire de Tarnac a épuisé deux de ses acteurs les plus acharnés.


*Le document est disponible sur http://fragmentsduvisible.org/

**Le juge Edmond Brunaud avait déjà été remplacé par la juge Jeanne Duyé en septembre 2011, à la suite de son départ du pôle antiterroriste. Reste donc Yves Jannier et Jeanne Duyé, qui devient premier juge d’instruction chargé de l’affaire. M. Jannier devient procureur de la République à Pontoise quelques mois plus tard, laissant sa consœur seule. Elle est aujourd’hui assistée de Christophe Teissier (qui instruit entre autres l’affaire Merah).


Article original par Laurent Borredon publié le 02/08/2014

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#44

Après le sabotage de trois lignes TGV le 8 novembre 2008, Julien Coupat et huit de ses amis, sont mis en examen pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. Attaqué par les politiques, les avocats des mis en examen, les mis en examen, le juge d'instruction Thierry Fragnoli a toujours encaissé et gardé la foi dans son dossier. Début 2012, un enchaînement de circonstances change la donne.

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#46

Après le sabotage de trois lignes TGV le 8 novembre 2008, Julien Coupat et huit de ses amis, sont mis en examen pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. Le juge Thierry Fragnoli et la SDAT ont commencé, un peu tard, à s'occuper de trouver des preuves de ces sabotages. Ils ont échafaudé des hypothèses. Le premier a jeté l'éponge, en mars 2012, laissant la place à Jeanne Duyé.

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